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La banque ? C’est au tabac du coin

La banque ? C’est au tabac du coin

QUAND LE BUREAU DE TABAC DEVIENT UNE MINI-BANQUEPARIS (Reuters) – Les emblématiques bureaux de tabac de quartier devraient bientôt devenir des mini-banques où chacun pourra ouvrir un compte à vue en cinq minutes: c’est le défi que se lancent cinq entrepreneurs et plusieurs dizaines de buralistes pour diversifier leur offre en France à partir de 2014.

En contrepartie d’un abonnement annuel de 20 euros et de la présentation d’une carte d’identité ou de séjour, le détenteur de ce compte low-cost se verra immédiatement délivrer par son débitant de tabac une carte bancaire MasterCard, un relevé d’identité bancaire et des identifiants pour accéder, en ligne, à la gestion de son argent.

Originalité de l’offre, baptisée « Compte-Nickel »: pas de chéquier ni de possibilité de découvert ou de crédit pour limiter les frais et éviter les conflits. S’il manque des liquidités sur le compte avant un prélèvement, le titulaire sera prévenu par SMS.

Le buraliste, pour qui l’équipement sera gratuit, n’aura qu’à activer le compte du client au moyen d’une petite borne numérique tactile capable de scanner les documents d’identité.

L’objectif de cette initiative est double: capter une clientèle aux revenus modestes ou lassée des banques classiques – le « Compte-Nickel » sera proposé sans conditions de revenus, de dépôts ou de patrimoine – et offrir un relais de croissance aux 27.000 buralistes français qui peinent à compenser l’érosion continue des ventes de cigarettes.

« Nous sommes les premiers commerces de proximité de la population. Avec ce compte nous apportons l’accès bancaire à ceux qui se sentent oubliés, notamment dans les zones rurales, ou exclus par un accident de parcours », a déclaré mercredi à la presse Pascal Montredon, président de la confédération des buralistes.

Le Compte-Nickel se présente donc logiquement comme une réponse à tous les détenteurs de comptes en difficulté avec leur banque ou aux populations en situation de précarité mais également à ceux qui souhaiteraient disposer d’une offre de paiement alternative, moins contraignante que celles des banques de dépôt, un marché potentiel de plusieurs millions de clients.

Les buralistes ont signé un contrat d’exclusivité de six ans avec les concepteurs de ce compte, réunis au sein d’une société spécialement créée, la Financière des paiements électroniques (FPE), dans laquelle la confédération a pris une participation de 5%.

« Plusieurs dizaines de buralistes sont équipés de la borne Compte-Nickel. Une centaine devrait l’être début 2014 et d’ici à la fin de l’année prochaine, nous visons 100.000 ouvertures de comptes ce qui nous permettrait d’atteindre notre point mort », explique l’un des fondateurs de la FPE, Hugues Le Bret, ancien directeur de la communication de la Société générale au moment de l’affaire Kerviel, passé ensuite chez Boursorama.

PAS DE SPÉCULATION

Les concepteurs du projet estiment les frais de tenue de compte à environ 50 euros par an en moyenne, un tarif beaucoup moins élevé que ceux pratiqués par la plupart des banques traditionnelles, qui réalisent une partie de leurs bénéfices grâce aux commissions prélevées en cas de découvert.

Le client du Compte-Nickel devra s’acquitter du remplacement de sa carte ou de ses appels vers le service clients et se verra prélever une commission sur ses dépôts (2% de la somme) et sur les retraits (de 50 centimes à un euro par opération). Ses prélèvements et virements seront gratuits.

« L’argent des clients ne sera pas utilisé pour spéculer. Il est sécurisé dans un compte de cantonnement logé au Crédit mutuel Arkea, autre partenaire du projet », a de son côté fait valoir Ryad Boulanouar, président de la FPE et anciennement en charge de piloter le projet du laissez-passer sans contact Navigo à la SNCF .

La FPE a obtenu en juin un agrément de l’Autorité de contrôle prudentiel en qualité d’établissement de paiement, un statut qui lui permet de proposer ses services mais qui n’en fait pas pour autant une banque à part entière, soumise aux exigences de fonds propres définies par le comité de Bâle.

Au 15 juin, ses fonds propres totalisaient 11 millions d’euros.

Le lancement du Compte-Nickel n’intervient pas au meilleur moment pour les banques françaises. Eprouvées par la crise et la montée en puissance des usages numériques, nombre d’entre elles comme Société générale ou BNP envisagent de fermer des agences l’an prochain.

Les banques françaises n’ont toutefois pas attendu pour réagir.

BNP a récemment lancé une banque entièrement numérique, Hello Bank!, en Allemagne, en Italie, en Belgique et en France où le groupe vise 25.000 clients d’ici à 2017.

Dans les paiements électroniques, un créneau dominé depuis plusieurs années par l’Américain Paypal (groupe Ebay), BNP, Société générale et la Banque postale commercialisent un nouveau service destiné à sécuriser les transactions de leurs clients. A l’international, les modèles de paiement alternatifs à ceux proposés par les banques continuent de se chercher un avenir. Electronique et décentralisée, la monnaie Bitcoin continue sa percée et a vu son cours monter ces derniers mois.

Edité par Jean-Michel Bélot

 

Reuters par Matthias Blamont et Lionel Laurent

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