Sept pays européens – France, Allemagne, Grèce, Espagne, Italie, Pays-Bas etPologne – ont lancé à Bruxelles, mardi 19 novembre, un « club des utilisateurs de drones » à l’occasion d’une réunion des ministres de la défense.
Déjà détenteurs, ou futurs détenteurs de drones, ces Etats s’engagent àdévelopper, à l’horizon 2020, un appareil européen de moyenne altitude et de longue endurance (MALE) de nouvelle génération. Les pays concernés, via l’Agence européenne de défense (AED), promettent d’échanger leurs expériences et d' »identifier les opportunités de coopération » dans divers domaines : entraînement, logistique, maintenance, développement. Un autre groupe -Royaume-Uni, Autriche, Belgique, République tchèque – rassemble des nations qui se déclarent prêtes à investir dans le projet et à examiner ses implications technologiques mais sans, pour l’instant, vouloir envisager dans une éventuelle production commune.
Avec cette initiative, confirmée peu avant la tenue mi-décembre d’un Conseil des chefs d’Etat et de gouvernement européens consacré exceptionnellement à la défense, l’espoir est de relancer des coopérations. Elles sont depuis plusieurs années gelées par un manque de volonté politique et la réduction généralisée des budgets de défense. Les ministres ne veulent pas ouvrir le Conseil les mains vides.
Le but du « club » est de ne pas rater un équipement jugé crucial par les armées et aux implications industrielles sont majeures. Il s’agit d’éviter une dépendancedéfinitive des Européens dans un marché dominé par les Etats-Unis et Israël.
L’AED entend identifier les domaines où les investissements favoriseront la compétitivité de l’industrie européenne. L’aéronautique de défense mise sur les drones pour maintenir ses bureaux d’étude : à l’horizon 2030, c’est un engin non piloté de combat, propre à succéder aux avions de chasse, qui doit être élaboré.
INTERMINABLE FEUILLETON POLITICO-INDUSTRIEL
Le dossier, sur lequel la France affiche sa volonté de réunir les entreprises européennes, relève depuis vingt ans d’un interminable feuilleton politico-industriel. Aucune filière européenne n’a pu aboutir jusqu’à présent. Les luttes entre lesentreprises nationales sont âpres.
Dans le cadre du traité de Lancaster House, Paris et Londres ont scellé des coopérations en la matière, en se basant sur le tandem Dassault-BAE pour les appareils du futur. Mais le ministère de la défense a aussi décidé d’acheter 12 Reaper de l’américain General Atomics, pour combler à court terme le manque de drones MALE de l’armée française, et en attendant la solution européenne.
L’armée de l’air vient de former ses équipages aux Etats-Unis sur deux premiers appareils. Livrés en décembre, ils seront basés à Niamey au Niger pour les opérations de contre-terrorisme au Sahel. Ces appareils américains n’ont pas de certification pour voler dans le ciel européen.
Cette décision d’achat américain « sur étagères » a ulcéré les industriels. Mi-octobre, Dassault, EADS et Finmeccanica ont réagi en ressuscitant le projet franco-allemand du drone Talarion, auquel Dassault s’était opposé quelques années plus tôt et qui avait été enterré.
Le ministre français Jean-Yves Le Drian a également promu dans ce cadre l’idée d’un « club Reaper » pour que les Européens utilisateurs de ce drone, Allemands, Britanniques, Italiens et Français, puissent l’adapter : l’enjeu est de pouvoir yplacer leurs propres capteurs, mais aussi de s’assurer de liaisons sécurisées autonomes. Ce sujet fait l’objet de négociations difficiles avec le Pentagone. Washington refuse de donner les codes des appareils afin de les modifier.
Ce club Reaper semble encore plus difficile à réunir que le premier. Les armées des uns et des autres n’ont pas exprimé de besoin commun. Les industriels nationaux doivent encore s’entendre sur la répartition des tâches. Au final, les questions de souveraineté pourraient être malmenées par le manque d’argent : compte tenu de la baisse des budgets, le meilleur prix emportera les décisions assurent tous les acteurs du dossier.
Source : Le Monde
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