NEW DELHI (Reuters) – L’Inde a envoyé mardi son premier engin spatial vers Mars, autour de laquelle elle compte le placer en orbite pour un coût sensiblement inférieur aux précédentes missions, ce qui fera d’elle, en cas de succès, un nouvel acteur de poids dans la course à l’espace.
Le lanceur Polar Satellite Launch Vehicle XL (PSLV) a décollé mardi d’un pas de tir situé sur la côte sud-est de l’Inde. Il faudra environ 300 jours à la sonde indienne Mangalyaan (Mars Orbiter Mission) pour atteindre Mars, où, à partir de septembre 2014, elle recherchera des traces de méthane dans l’atmosphère et étudiera la composition minérale de son sol.
Le méthane est un composé chimique étroitement lié à la présence de vie sur Terre. Le rover Curiosity de la Nasa n’en a détecté récemment que des quantités infimes à la surface de la planète rouge, décourageant ceux qui espéraient recueillir la preuve de traces de vie.
« C’est le modeste commencement de notre mission interplanétaire », a déclaré Deviprasad Karnik, porte-parole de la société spatiale nationale ISRO (Indian Space Research Organisation).
A ce jour, seuls les Etats-Unis, l’Europe et la Russie ont réussi à placer en orbite autour de Mars ou à faire atterrir sur la « planète rouge » des engins spatiaux automatiques. Le taux d’échec des missions vers Mars est élevé et un succès conforterait la fierté nationale indienne, notamment du fait qu’un engin analogue lancé vers Mars par les Chinois n’a pas réussi à quitter l’orbite de la Terre en 2011.
Les relations de l’Inde avec son puissant voisin chinois sont marquées autant par la compétition que par la coopération. Les scientifiques indiens se refusent à parler de course à l’espace, mais, relèvent les analystes, New Delhi a accéléré son programme spatial en raison des inquiétudes suscitées par la technologie spatiale chinoise, tant civile que militaire.
PROGRAMME SPATIAL CRITIQUÉ
La sonde Mangalyaan, d’un coût de 4,5 milliards de roupies (73 millions de dollars), est un engin « low cost » par comparaison avec la mission MAVEN (Mars Atmosphere and Volatile EvolutioN) que doit lancer la Nasa vers la « planète rouge » le 18 novembre. Selon les experts, l’Inde pourrait s’imposer sur le marché international des lancements de satellite grâce à sa technologie à bas coût.
L’ISRO a prévu que la sonde effectue six ou sept rotations autour de la Terre afin de bénéficier d’un « effet de fronde » qui la propulse plus aisément vers Mars, ce qui permettra d’économiser du carburant.
De façon plus générale, envoyer un gramme dans l’espace coûte à l’Inde un millier de roupies (un peu plus de 16 dollars), soit un dixième de ce qu’il en coûte pour la Nasa, déclare un scientifique indien, Mayank N. Vahia.
La mission vers Mars est considérablement moins chère que certains des projets somptuaires de l’Inde, dont celui de la construction de la plus grande statue au monde, dans l’Etat de Gujarat (340 millions de dollars). Mais bien que « low cost », cette mission spatiale a été la cible de critiques dans un pays souffrant d’un niveau élevé de pauvreté, de malnutrition et de pénuries d’électricité, et dont la croissance économique connaît son plus sérieux ralentissement en dix ans.
UNE SONDE SUR LA LUNE
A ces critiques, l’Inde rétorque que les technologies développées dans le cadre de son programme spatial ont des applications concrètes dans la vie de tous les jours.
« Pour un pays comme l’Inde, ce n’est pas un luxe, c’est une nécessité », déclare Susmita Mohanty, cofondatrice et directrice de Earth2Orbit, la première start-up privée indienne de l’espace. Elle fait remarquer que le champ d’application des satellites s’étend de la retransmission des chaînes télévisées à la gestion des catastrophes.
Le programme spatial indien a vu le jour voici un demi-siècle et s’est développé rapidement après l’instauration de sanctions occidentales, consécutives à un essai nucléaire mené en 1974. Ces sanctions avaient convaincu les scientifiques de mettre au point une technologie balistique de pointe.
En 2008, la sonde Chandrayaan s’est posée sur la Lune où elle a recueilli la preuve de la présence d’eau dans le sol de notre satellite. La prouesse relative de l’industrie spatiale indienne contraste avec la difficulté que rencontre New Delhi pour mettre au point ses propres avions chasseurs.
Bertrand Boucey et Eric Faye pour le service français, édité par Henri-Pierre André
Reuters par Sruthi Gottipati
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