ROME (Reuters) – Le gouvernement italien d’Enrico Letta a obtenu mercredi la confiance du parlement italien, un vote sans appel marquant l’échec de la stratégie de rupture préconisée par Silvio Berlusconi qui a finalement baissé pavillon.
« Il Cavaliere », qui s’était promis de faire tomber la coalition entre le centre-droit et le centre-gauche, après avoir imposé la démission des cinq ministres de son parti, Peuple de la liberté (PDL), a dû renoncer à ses projets face à la fronde de son propre camp.
Lors d’un vote auquel certains élus PDL n’ont pas pris part, le Sénat a donc accordé mercredi en début d’après-midi la confiance à Enrico Letta par 235 voix contre 70.
Dans la soirée, 435 députés de la Chambre basse, où le président du Conseil dispose d’une majorité confortable, ont, comme prévu, voté à leur tour la confiance. Le « non » a recueilli 162 voix.
Après cette issue heureuse pour Enrico Letta, le président Giorgio Napolitano, qui voulait comme le chef du gouvernement éviter des élections anticipées, a lancé une mise en garde aux partis politiques.
« Le gouvernement a passé le test, relevé le défi », s’est félicité le chef de l’Etat dans un communiqué dans lequel il prévient que l’Italie, en grande difficulté économique, ne peut pas s’offrir le luxe d’une instabilité politique chronique.
Giorgio Napolitano n’est manifestement pas le seul à le penser: c’est parce qu’il a été lâché par une partie des parlementaires du PDL que Silvio Berlusconi a finalement décidé, presque à la dernière minute, d’accorder la confiance au « governissimo » en place depuis fin avril, qu’il jurait pourtant d’abattre depuis samedi, quand il a demandé à ses cinq ministres de démissionner.
Menacé de perdre son siège au Sénat à la suite de sa condamnation judiciaire en août, « Il Cavaliere » était partisan avec les « faucons » du PDL d’une ligne dure devant aboutir à la chute du gouvernement et à de nouvelles élections.
Mais cette attitude a été désavouée par une grande partie du PDL, notamment par les cinq ministres démissionnaires, favorables à la survie du gouvernement de coalition en cette période cruciale de discussions budgétaires, et Silvio Berlusconi a annoncé son revirement en début d’après-midi.
LA DÉFAITE DE BERLUSCONI
« Nous avons décidé, non sans quelques tourments, de soutenir le gouvernement », a-t-il dit après avoir entendu les promesses du président du Conseil en faveur d’une baisse des impôts et des réformes économiques et judiciaires.
Il n’y a pas eu d’abstentions mais des élus PDL sont sortis de l’assemblée pour ne pas être présents au moment du vote.
Face au virage à 180 degrés opéré par le chef de la droite italienne, un élu centriste a dénoncé une « farce » et Luigi Zanda, président du groupe du Parti démocrate (PD) au Sénat, « une tentative de masquer une défaite politique ».
La crise au sein du PDL devrait laisser des traces, avec un Silvio Berlusconi affaibli et des sensibilités différentes qui ont eu l’occasion de s’affronter ces derniers jours.
Le numéro deux du PDL, Angelino Alfano, secrétaire du parti et fidèle d’entre les fidèles du « Cavaliere », avait appelé dès mardi l’ensemble de ses élus à voter la confiance. Une « trahison » dénoncée mercredi en grosses lettres noires en « une » d’Il Giornale, propriété de la famille Berlusconi.
Mercredi matin, le sénateur PDL Roberto Formigoni déclarait que 25 des 91 sénateurs du parti étaient prêts à faire scission et à former leur propre groupe parlementaire.
Le ministre des Transports démissionnaire Maurizio Lupi, un modéré du PDL, avait indiqué un peu plus tard que des dissidents du parti avaient déposé une motion de soutien au gouvernement.
Finalement, après bien des tergiversations et des déclarations contradictoires au sein du PDL, Silvio Berlusconi annonçait son revirement.
Dans la matinée, Enrico Letta avait prévenu les parlementaires que la chute de son gouvernement serait « fatale » pour l’Italie et que de nouvelles élections risquaient de ne pas résoudre la crise politique.
La loi électorale donne autant de pouvoir aux sénateurs qu’aux députés et est considérée par beaucoup comme l’une des causes de l’impasse politique provoquée par les dernières élections législatives, fin février.
Une commission sénatoriale pourrait lancer vendredi la procédure de déchéance de Silvio Berlusconi de son mandat de sénateur, dans la foulée de sa condamnation en dernière instance pour fraude fiscale.
Sa peine de quatre ans de réclusion a été ramenée à un an par la suite en raison de son âge, 77 ans, et il aura à choisir ce mois-ci entre une assignation à résidence ou des travaux d’intérêt général.
Eric Faye, Guy Kerivel, Jean-Loup Fiévet et Tangi Salaün pour le service français
Source : Reuters par Paolo Biondi
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