SAO PAULO (Reuters) par Brad Haynes – Plusieurs centaines de milliers de Brésiliens ont manifesté dimanche dans tout le pays pour réclamer le départ de la présidente Dilma Rousseff, qu’ils rendent responsable d’un vaste scandale de corruption et de la pire crise économique qu’ait subie le pays depuis un quart de siècle.
Moins d’un an après sa réélection à la tête du pays, Dilma Rousseff a vu sa popularité tomber sous 10% dans de récents sondages et deux Brésiliens sur trois se prononcent en faveur de sa destitution.
La journée d’action de dimanche, la troisième organisée depuis le début de l’année, s’est déroulée dans une ambiance festive aux cris de « Dehors Dilma ».
Environ 135.000 personnes se sont rassemblées dans le quartier des affaires de Sao Paulo, selon l’institut de sondage Datafolha, et 25.000 manifestants se sont réunis devant le Congrès à Brasilia, la capitale, selon la police. A Rio de Janeiro, la manifestation a débuté en milieu de journée sur la plage de Copacabana.
La participation semble ainsi globalement identique à celle de la journée de contestation organisée en avril, mais inférieure à la mobilisation du mois de mars.
Dans un communiqué, le porte-parole du gouvernement a jugé que les manifestations étaient « un élément normal de la démocratie ».
Le mécontentement est largement répandu dans toutes les catégories sociales face à la montée du chômage et à l’inflation, qui font craindre la pire situation économique depuis les années 1980.
La politique d’austérité menée par le gouvernement, qui vise à contenir la hausse des prix et à éviter que la note souveraine du pays ne soit dégradée en catégorie spéculative (« junk »), a en outre découragé certains soutiens traditionnels du camp Rousseff et la présidente se heurte même à la résistance d’une partie des députés de la majorité.
La banque centrale brésilienne a annoncé fin juin s’attendre à une baisse de 1,1% du produit intérieur brut (PIB).
RÉCESSION ET CORRUPTION
« On n’entend parler que de coupes budgétaires mais pour l’instant, cela ne pénalise que des gens comme moi », a déclaré dimanche Francisco Mosack, un retraité de la métallurgie qui vit dans le quartier modeste de Capao Redondo à Sao Paulo, expliquant que sa facture d’électricité a doublé en un an.
Une enquête de l’institut Datafolha publiée il y a quelques jours a montré que les Brésiliens les plus pauvres et les moins éduqués étaient les plus farouches partisans du départ de Dilma Rousseff, alors qu’ils avaient voté en masse pour elle lors de la présidentielle d’octobre dernier, qu’elle a remportée d’une courte tête.
Parallèlement à la situation économique, la présidente doit faire face au scandale provoqué par l’enquête pour corruption et blanchiment d’argent visant la compagnie pétrolière publique Petrobras, qui éclabousse une bonne partie de la classe politique brésilienne.
L’affaire, le plus important dossier de corruption jamais révélé au Brésil, a déjà conduit en prison plusieurs des plus importants dirigeants d’entreprise du pays et certains suspects ont mis en cause des figures du Congrès et des membres de l’administration Rousseff.
Aucun élément du dossier n’a à ce jour directement incriminé la présidente mais de nombreux partisans de sa destitution estiment qu’elle est responsable de la gestion corrompue de Petrobras, dont elle a présidé le conseil d’administration de 2003 à 2010.
(avec Anthony Boadle et Luciana Otoni à Brasilia, Roberto Samora et Eduardo Simões à Sao Paulo; Marc Angrand et Bertrand Boucey pour le service français)
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