NATIONS UNIES (Reuters) – Vladimir Poutine et Barack Obama ont convenu, lors de leur premier entretien bilatéral en plus de deux ans, de chercher une solution politique en Syrie mais divergent toujours sur le sort de Bachar al Assad, allié de Moscou dont Washington réclame le départ à plus ou moins brève échéance.
Durant un tête à tête de 90 minutes lundi soir, le président russe et son homologue américain ont approuvé le principe de discussions tactiques entre leurs deux armées pour éviter tout incident lors d’éventuelles opérations dans le pays du Proche-Orient, où la Russie renforce sa présence militaire depuis plusieurs semaines.
Les Etats-Unis dirigent quant à eux depuis plus d’un an une coalition qui mène des frappes aériennes contre l’organisation djihadiste EI (Etat islamique) en Irak et en Syrie. La France, qui partage le point de vue de Washington sur Bachar al Assad, a mené dimanche son premier raid en territoire syrien.
Vladimir Poutine et Barack Obama se sont rencontrés au siège de l’Onu après avoir pris chacun la parole dans la journée lors de la 70e Assemblée générale des Nations unies.
Au terme de l’entretien, Vladimir Poutine a déclaré à la presse que la Russie examinait les moyens de soutenir davantage le gouvernement syrien et les forces kurdes contre l’EI.
« Nous réfléchissons à ce que nous pourrions faire de plus pour soutenir ceux qui résistent et combattent sur le champ de bataille contre les terroristes, à commencer par l’EI », a-t-il dit, tout en excluant l’envoi de troupes russes au sol.
« Il existe une opportunité d’oeuvrer ensemble au règlement des problèmes », a estimé le chef du Kremlin.
Un haut responsable américain s’exprimant sous le sceau de l’anonymat a déclaré quant à lui que « les Russes comprenaient très bien l’importance d’une solution politique au conflit et d’un processus de recherche de cette solution ».
« ÉNORME ERREUR »
Les liens entre Washington et Moscou se sont fortement tendus depuis la crise ukrainienne de l’an dernier, autre sujet évoqué lors du tête à tête entre les deux dirigeants.
Avant leur entretien, Barack Obama et Vladimir Poutine s’étaient déjà croisés dans la journée, dans un climat glacial.
A la tribune de l’Onu, où ils se sont presque succédé, le président russe a prôné la création d’une coalition élargie en Syrie pour lutter contre les « terroristes » et réaffirmé son soutien au régime de Bachar al Assad, jugeant que le refus de coopérer avec le président syrien constituait une « énorme erreur ».
Barack Obama a quant à lui indiqué que les Etats-Unis étaient « prêts à travailler avec toutes les nations, y compris la Russie et l’Iran », les deux principaux alliés de Damas, pour résoudre le conflit, tout en réaffirmant que toute solution passait par le départ d’Assad, qu’il a qualifié de « tyran », une position également défendue par François Hollande.
« Nous devons nous accorder sur le fait qu’il ne peut y avoir, après tant de bains de sang, après tant de carnages, de retour au statu quo d’avant-guerre », a souligné Barack Obama.
Le président américain n’a toutefois pas explicitement appelé au départ de Bachar al Assad. Il a évoqué une « transition en bon ordre permettant de tourner la page Assad ».
« RIEN N’A CHANGÉ »
« Cette transition, elle passe nécessairement par le départ de Bachar al Assad, rien n’a changé », a souligné de son côté François Hollande.
Le Premier ministre turc, Ahmet Davutoglu, a rejeté lui aussi la possibilité d’un maintien au pouvoir du président syrien. Le ministre qatari des Affaires étrangères, Khaled al Attiyah, a estimé que personne ne pouvait rejeter l’appel lancé par Vladimir Poutine à une alliance mondiale contre le terrorisme mais ajouté qu’il fallait « traiter la véritable cause » du problème, qui est « le régime syrien, à savoir Bachar al Assad ».
Le président russe a rétorqué en sortant de son entretien avec le chef de la Maison blanche que c’était au peuple syrien de décider du sort du président syrien, et non à Barack Obama ni à François Hollande.
Vladimir Poutine a ajouté que la Russie n’excluait pas de participer avec les Occidentaux à des opérations militaires contre l’EI mandatées par les Nations unies.
En dépit de leurs divergences, les Etats-Unis et la Russie ont coopéré au sein du groupe P5+1, avec la Chine, la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne, pour négocier un accord historique sur le nucléaire iranien, conclu le 14 juillet dernier à Vienne.
Le même groupe de pays pourrait se saisir du dossier syrien, a estimé la porte-parole de la diplomatie européenne Federica Mogherini en sortant d’une réunion avec les ministres des Affaires étrangères du P5+1 et de l’Iran lundi soir.
(Jean-Stéphane Brosse pour le service français)
Source : Reuters par Jeff Mason et Denis Dyomkin
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