BANGKOK (Reuters) par Amy Sawitta Lefevre et Aukkarapon Niyomyat – Les autorités thaïlandaises n’excluent aucune piste pour retrouver les auteurs de l’attentat qui a fait 22 morts lundi soir dans le centre de Bangkok, y compris celle d’opposants au pouvoir militaire.
Toutefois, l’armée juge que le mode opératoire « ne ressemble pas » aux méthodes employées par les rebelles séparatistes du sud de la Thaïlande.
Un « suspect » repéré sur les caméras de surveillance près du site de l’explosion est recherché, a annoncé mardi le Premier ministre, Prayuth Chan-ocha. « J’ai ordonné que les images des caméras soient vérifiées car il y a un suspect, mais ce n’est pas clair qui il est », a-t-il dit aux médias.
Huit étrangers, dont trois Chinois, figurent parmi les personnes tuées dans cette attaque commise contre un sanctuaire religieux prisé par les touristes.
Cet attentat, qui vise selon le gouvernement à saper l’économie du pays, n’a pas été revendiqué.
Des policiers étaient encore déployés mardi matin sur le site de l’attentat à la recherche de nouveaux indices au milieu des flaques de sang.
« La police n’exclut rien, y compris la politique intérieure et le conflit relatif aux Ouïghours que la Thaïlande a renvoyés en Chine », a déclaré mardi à la presse le chef de la police, Somyot Pumpanmuang.
La Thaïlande a expulsé en juillet 109 Ouïghours vers la Chine.
Des centaines, voire des milliers, de membres de cette minorité musulmane turcophone ont fui les troubles qui agitent le Xinjiang, région de l’ouest de la Chine où ils se disent persécutés. Les autorités chinoises imputent ces violences à des rebelles séparatistes. De nombreux Ouïghours tentent de gagner la Turquie via l’Asie du Sud-Est.
Le Premier ministre, Prayuth Chan-ocha, selon lequel cet attentat est sans précédent en Thaïlande, a pour sa part déclaré qu’il existait « encore des groupes antigouvernementaux », sans plus de précisions.
En tant que chef de l’armée, Prayuth Chan-ocha a conduit un coup d’Etat en mai 2014 après plusieurs mois d’agitation politique en Thaïlande. Il a ensuite été nommé Premier ministre en août 2014. Il a annoncé mardi un remaniement du gouvernement.
ATTRACTION TOURISTIQUE
Les autorités thaïlandaises n’ont pour l’instant accusé directement personne pour cet attentat.
Le porte-parole de la police thaïlandaise a avancé mardi un bilan de 22 morts et 123 blessés.
Trois Chinois figurent parmi les personnes tuées, a rapporté l’agence de presse officielle Chine nouvelle. Deux habitants de Hong Kong, deux Malaisiens et une personne originaire des Philippines ont aussi été tués, selon les autorités.
La Thaïlande est en proie depuis des années à des dissensions politiques dégénérant parfois en violences.
Les trois provinces du sud du pays, majoritairement bouddhiste, sont en outre le théâtre d’une rébellion séparatiste musulmane. Le conflit a fait plus de 6.500 morts, essentiellement des civils, depuis 2004 mais il a rarement débordé au-delà de ces trois régions.
Le chef de l’armée a émis des doutes quant à un lien entre cette insurrection dans le sud et l’attentat à Bangkok.
« Cela ne ressemble pas aux incidents qui ont lieu dans le sud de la Thaïlande. Le type de bombe utilisée ne correspond pas non plus à ce qui se passe dans le sud », a dit le général Udomdej Sitabutr, également vice-ministre de la Défense, dans une interview télévisée.
La bombe avait été placée à l’intérieur du temple d’Erawan. Situé à un carrefour très fréquenté de la capitale thaïlandaise, près de grands hôtels, de centres commerciaux, de bureaux et d’un hôpital, ce sanctuaire est une attraction touristique majeure de Bangkok, en particulier pour les visiteurs venus d’Asie de l’Est, notamment de Chine. De nombreux Thaïlandais viennent aussi fréquemment s’y recueillir.
« Les auteurs avaient l’intention de détruire notre économie et le tourisme car l’incident s’est produit au coeur du quartier touristique (de Bangkok) », a déclaré lundi soir le ministre de la Défense, Prawit Wongsuwan, à Reuters.
Le tourisme est l’un des rares secteurs porteurs de l’économie thaïlandaise, qui continue de souffrir plus d’un an après le coup d’Etat de l’armée en mai 2014. Il représente environ 10% de l’activité du pays et le gouvernement espérait un nombre record de visiteurs cette année après le net recul enregistré en 2014 en raison de l’agitation politique.
(Avec Andrew R.C. Marshall, Khettiya Jittapong, Martin Petty, Panarat Thepgumpanat, Bertrand Boucey pour le service français)
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