OSLO (Reuters) – Les représentants de trois des principales institutions européennes ont reçu lundi à Oslo le prix Nobel de la paix 2012 dont l’attribution en octobre à l’Union européenne a surpris les observateurs et consterné les eurosceptiques.
Après des jours de tergiversations, l’UE a décidé d’envoyer au grand complet Herman Van Rompuy, président du Conseil européen, qui rassemble les dirigeants des 27 pays membres, José Manuel Barroso, président de la Commission européenne, l’organe exécutif de l’Union et Martin Schulz, président du Parlement européen.
Une vingtaine de chefs d’Etats et de gouvernement, dont le président français François Hollande, la chancelière allemande Angela Merkel et le président du Conseil italien Mario Monti, ont également fait le déplacement dans la capitale norvégienne, ainsi que quatre jeunes Européens sélectionnés par concours. Le Premier ministre britannique David Cameron, actuellement aux prises avec l’aile eurosceptique de son parti conservateur, s’est en revanche abstenu de se rendre à Oslo.
« Soixante ans de paix, c’est une première dans la longue histoire de l’Europe », a déclaré Herman Van Rompuy à Reuters avant la cérémonie. « Les faits prouvent que l’Union européenne est un instrument de maintien de la paix de premier ordre », a-t-il ajouté.
Attribuant le prix à l’Union européenne, le 12 octobre, le comité Nobel norvégien expliquait que « l’Union et ses pionniers ont contribué pendant plus de six décennies à promouvoir la paix et la réconciliation, la démocratie et les droits de l’homme en Europe ».
Plusieurs personnalités, comme le Sud-Africain Desmond Tutu, lui-même lauréat du Nobel de la paix, ont cependant jugé que l’UE ne méritait pas le prix et un millier de militants d’organisations pacifistes classées à gauche ont manifesté dimanche à Oslo contre sa remise.
« Alfred Nobel a dit que le prix devait être remis à ceux qui contribuent au désarmement », a affirmé Elsa-Britt Enger, âgée de 70 ans, au nom de l’organisation des Grands-Mères pour la paix. « L’UE ne le fait pas. C’est l’un des plus gros fournisseurs d’armes. »
Afin de répondre à ce type de critiques, l’UE a annoncé que la somme de 930.000 euros qui accompagne le prix Nobel serait intégralement utilisée pour financer des projets destinés à lutter contre l’emploi d’enfants comme soldats, à travers le monde.
« D’UN CONTINENT EN GUERRE À UN CONTINENT EN PAIX »
L’Europe traverse la pire crise économique de son histoire depuis la Deuxième Guerre mondiale. Les politiques d’austérité mises en oeuvre à travers le continent sont à l’origine de troubles sociaux dans nombre des Etats-membres de l’UE, à commencer par la Grèce dont le produit intérieur brut s’est contracté de 25% depuis 2008.
Mais le comité Nobel a insisté sur le rôle joué par la construction européenne dans la réconciliation de nations longtemps ennemies, à commencer par l’Allemagne et la France, aujourd’hui moteurs de l’Europe.
« Au moment où l’Europe subit de graves difficultés, le comité Nobel norvégien a cherché à rappeler ce que l’Union européenne signifie pour la paix en Europe », a déclaré le président du comité, Thorbjørn Jagland, dans son discours prononcé lundi à l’Hôtel de ville d’Oslo.
Des six pays membres originels de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), premier outil de l’intégration européenne créé au début des années 1950, l’ensemble européen est passé à 27 membres aujourd’hui et bientôt 28 avec l’entrée de la Croatie le 1er juillet prochain.
Du Portugal à la Roumanie et de la Finlande à Malte, l’UE englobe désormais plus de 500 millions d’habitants.
« Le rôle stabilisateur joué par l’UE a contribué à faire passer la majeure partie de l’Europe d’un continent en guerre à un continent en paix », soulignent les membres du comité Nobel.
Pour Herman Van Rompuy, ce prix est un hommage rendu aux pères fondateurs de la construction européenne. « Je suis né après la guerre, j’appartiens à la première génération d’Européens dont l’existence a été épargnée par la guerre », a dit le dirigeant belge, 65 ans.
Les propos de José Manuel Barroso, ancien Premier ministre portugais qui a participé en son temps à la « révolution des oeillets », en 1974, renvoient au même thème.
« C’est une reconnaissance de ce qui a été accompli ces soixante dernières années et, en même temps, un encouragement pour l’avenir », a-t-il dit à Reuters. « Le message qu’ils nous font passer, c’est que nous avons construit une chose très précieuse que nous devons chérir et préserver. »
Julien Dury et Henri-Pierre André pour le service français, édité par Jean-Stéphane Brosse
par Luke Baker et Balazs Koranyi / Reuters
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