e roi Mohammed VI du Maroc s’est rendu samedi à Marrakech visée jeudi par un attentat qui a fait 16 morts, dont sept Français, contre un café du coeur touristique de la ville.
Au milieu d’un strict dispositif de sécurité et sous les saluts de centaines d’habitants, il a fait une halte de quelques minutes sur la place Jamâa El-Fna, où s’est produit cette attaque.
Le roi a serré la main de quelques Marocains parmi la foule compacte à proximité du café Argana, qui a été soufflé par l’explosion d’une bombe commandée à distance. Les murs ont été éventrés, et au sol, des débris sont amoncelés sur des flaques de sang séché. Des couronnes et des bouquets de fleurs y ont été déposés samedi matin, en hommage aux victimes.
Mohammed VI est allé constaté les dégâts dans le café, d’où les touristes aimaient admirer la place Jamâa El-Fna, puis s’est brièvement entretenu avec des agents de la police technique et scientifique marocaine, qui continuaient samedi à recueillir des indices.
Cet attentat n’a toujours pas été revendiqué, mais les autorités ont mentionné un procédé qui fait penser aux émules d’Al-Qaïda.
Plusieurs centaines de policiers et d’agents de sécurité avaient été déployés à Marrakech pour cette visite royale.
Le souverain est ensuite allé à l’hôpital Ibn-Tofail, où se trouvent selon l’agence marocaine Map sept blessés, deux Marocains et cinq Français, ainsi qu’à l’hôpital militaire, où deux Néerlandais, deux Français et un Marocain reçoivent des soins.
Selon une source diplomatique française, deux blessés français ont été rapatriés dans leur pays.
Avec 16 morts et 25 blessés, l’attaque de jeudi est la plus meurtrière au Maroc depuis les attentats islamistes de mai 2003 à Casablanca qui avaient tué 33 personnes, ainsi que les 12 kamikazes impliqués.
L’attentat n’a pas découragé les touristes, qui sont une source de revenus indispensables pour ce pays d’Afrique du nord de 32 millions d’habitants, épargné jusqu’ici par les violences qui secouent la région depuis le début de l’année. « Il y a eu quelques annulations, mais peu jusqu’à présent, rien de dramatique. Ca se compte par dizaines », a assuré à l’AFP le ministre du Tourisme, Yassir Zénagui.
« C’est très loin de ce qu’on aurait pu penser », a-t-il ajouté, se disant même « surpris ».
Dès jeudi, le roi, qui fait face à des demandes de réformes depuis le début de l’année, avait ordonné une enquête rapide et transparente.
Selon un haut responsable de la sécurité, il n’y a pas eu d’arrestation, mais les déclarations de deux touristes néerlandais ont permis d’établir le portrait-robot d’un suspect.
Il s’agirait d’un Arabe, jeune, bien rasé et aux cheveux longs qui a été vu au café Argana, quelques minutes avant l’attentat.
Le gouvernement marocain a mentionné un procédé qui fait penser à Al-Qaïda et a assuré que « l’hypothèse du kamikaze », avancée dans un premier temps, était désormais « exclue ».
Des experts américains, français et espagnols participent à l’enquête sur l’attentat, a indiqué à l’AFP un haut responsable du ministère de l’Intérieur.
Sept des personnes décédées sont de nationalité française, mais le ministre français de l’Intérieur Claude Guéant a estimé dans Le Journal du Dimanche que « rien ne permet d’affirmer » que la France était visée par l’attentat.
M. Guéant a souligné qu' »il faut attendre la revendication » pour savoir si Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a organisé l’attentat qui, dit-il, lui « rappelle » ceux de 1995 à Paris.
Par ailleurs, l’organisation non gouvernementale Human Rights Watch (HRW) a appelé les autorités marocaines à ne pas commettre « d’abus graves » sur les éventuels suspects et à ne pas « bloquer » les réformes démocratiques engagées récemment.
Human Rights Watch rappelle avoir dénoncé par le passé « de nombreuses violations des droits humains des suspects de terrorisme au Maroc ». L’ONG cite le cas de la répression qui s’est abattue sur des groupes islamistes après les attentats de Casablanca en 2003.
Dimanche, la place Jamâa El-Fna changera de visage: c’est là qu’arrivera le défilé du 1er mai. Le Mouvement du 20 Février, qui revendique des changements politiques au Maroc, sera aux côtés des syndicalistes et des étudiants, à Marrakech, comme dans les autres villes.
Par Virginie GROGNOU | AFP
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