LE CAIRE (Reuters) – Le « oui » est en tête en Egypte après le premier jour de référendum sur une nouvelle Constitution dimanche et la seconde journée de scrutin, samedi prochain, devrait amplifier ce résultat.
« Le référendum a abouti à 56,5% de oui », a dit un responsable chargé de superviser le déroulement du scrutin pour le compte du Parti Liberté et Justice (PLJ) fondé par la confrérie islamiste des Frères musulmans.
Cette estimation se fonde sur les résultats en provenance de 99% des bureaux de vote dans les 10 régions du pays, dont Le Caire, concernées par le scrutin de samedi.
Le PLJ disposait de représentants dans quasiment l’intégralité de ces bureaux.
Les autres régions voteront samedi et les résultats officiels seront uniquement connus ensuite. Le « oui » devrait y arriver en tête, étant donné que les régions concernées sont considérées comme plus favorables aux islamistes, selon des analystes.
Le vote s’est déroulé dans le calme. De longues files d’attente ont été constatées devant les bureaux, mais le taux de participation non officiel est estimé à un tiers des 26 millions d’électeurs appelés à s’exprimer samedi.
Le Front de salut national (FSN), qui regroupe les courants d’opposition, a d’ores et déjà fait savoir qu’il ne reconnaissait pas les résultats officieux avancés par les Frères en raison, selon lui, de nombreuses irrégularités.
« Le processus électoral du référendum a été gâché par de nombreuses violations, irrégularités et manquements », a estimé le Front dans un communiqué.
LES PARTISANS DU ‘NON’, DES « HÉRÉTIQUES »
Des organisations de défense des droits de l’homme ont de leur côté rapporté plusieurs abus, comme l’ouverture tardive de certains bureaux de vote, les consignes de vote données par des responsables, et des cas de corruption.
Ils ont également dénoncé une campagne faisant passer les partisans du « non » pour des hérétiques.
Dans un communiqué commun, sept ONG ont appelé les organisateurs du scrutin « à éviter ces erreurs dans la seconde journée du référendum et à réorganiser la première journée. »
Vainqueurs des différentes élections organisées depuis le renversement de Hosni Moubarak en février 2011, les Frères musulmans sont favorables à l’adoption de ce projet de Constitution rédigé par une assemblée dominée par les islamistes.
Après avoir porté l’un des leurs, Mohamed Morsi, à la présidence, ils présentent ce texte comme un élément essentiel de la stabilisation du pays après quasiment deux années de chaos politique et économique.
L’opposition laïque et libérale dénonce en revanche un projet liberticide trop fortement empreint de principes religieux.
« La nation est de plus en plus divisée et les piliers de l’État chancellent », a écrit le militant de l’opposition et prix Nobel de la paix, Mohamed ElBaradeï sur Twitter.
« La pauvreté et l’illettrisme sont un terrain fertile pour le prosélytisme », a-t-il ajouté.
L’un des représentants de l’opposition a toutefois dit à Reuters: « Je pense que nous avons perdu ».
CONSENSUS
Selon ce dernier, les adversaires du projet ont notamment été surpris par l’ampleur du vote « oui » à Alexandrie, ce qui a contribué à faire pencher la balance en faveur des islamistes.
Mais les résultats devraient être serrés.
« Même si le résultat (annoncé) est correct, cela ne veut pas dire que la Constitution peut passer, car cela signifiera que plus de 40% de la population la désapprouve », a déclaré Issam Amin, responsable de l’opposition s’exprimant au Caire.
Cette position correspond à la ligne adoptée par l’opposition qui soutient qu’une simple majorité ne suffit pas et qu’il faut un consensus.
Une faible victoire du ‘oui’ redonnerait par ailleurs espoir à la coalition hétéroclite de libéraux, de laïcs, de chrétiens ou encore de socialistes, malheureux aux deux élections qui se sont tenues depuis la chute de Hosni Moubarak en 2011.
Et le FSN, dont Mohamed ElBaradeï fait partie, pourrait permettre de rassembler cette opposition pour les élections législatives qui devraient être organisées dans le courant de l’année 2013 si la Constitution était adoptée, selon des figures de l’opposition.
Les analystes s’interrogent toutefois sur le fait qu’une telle formation puisse survivre jusqu’aux élections.
Des affrontements violents au Caire et dans d’autres villes d’Égypte ont émaillé la campagne du référendum, avec au moins huit morts dans des heurts entre manifestants devant le palais présidentiel au début du mois et de nombreuses attaques sur des bâtiments appartenant au parti des Frères musulmans.
Marwa Awad et Yasmine Saleh, Bertrand Boucey et Agathe Machecourt pour le service français, édité par Pascal Liétout
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