NAIROBI (Reuters) – Des activistes islamistes étaient toujours retranchés avec des otages dimanche dans un centre commercial de Nairobi, où au moins 59 personnes, dont deux Françaises, ont été tuées dans cette attaque revendiquée par les Chabaab somaliens.
Ces derniers disent agir en représailles à l’intervention du Kenya en Somalie voisine depuis octobre 2011 contre les islamistes liés à Al Qaïda.
Le centre commercial de Westgate, fréquenté par de nombreux expatriés, était bondé lorsque les assaillants ont fait irruption samedi midi. Selon un témoin, ils ont crié aux musulmans de quitter les lieux avant d’ouvrir le feu.
L’assaut, lancé en pleine remise des prix d’un concours de cuisine pour enfants, a été suivi d’une intense fusillade et des coups de feu ont continué à retentir pendant plusieurs heures, puis des membres des services de sécurité sont parvenus à pénétrer dans le centre où ils ont entrepris de fouiller les boutiques une à une.
Pendant des heures, des cadavres sont restés à même le sol dans les restaurants du centre commercial, où continuait de résonner une musique d’ambiance.
Le calme qui était revenu durant une bonne partie de la nuit a été brisé dans la matinée par une fusillade d’une trentaine de secondes, a rapporté un journaliste de Reuters se trouvant à proximité du centre commercial, dont plusieurs boutiques appartiennent à des Israéliens.
Quelques instants plus tard, des militaires en tenue de camouflage se sont précipités sous la terrasse d’un restaurant devant la façade du bâtiment. L’attention des forces de l’ordre se concentre sur un supermarché Nakumatt, l’une des principales chaînes du pays.
PREMIÈRE CRISE POUR LE PRÉSIDENT KÉNYAN
De nombreux curieux se sont rassemblés aux abords du centre dans l’attente d’un dénouement qu’ils prédisent violent. « Ils sont entrés par le sang, ils sortiront par le sang », a dit un vigile, Jonathan Maungo.
Il s’agit de la première crise d’envergure pour le président Uhuru Kenyatta, élu en mars, qui a précisé dans une allocution télévisée que certains de ses proches figuraient parmi les morts.
« Nous avons surmonté d’autres attaques terroristes », a-t-il rappelé, évoquant l’attentat de 1998 contre l’ambassade des Etats-Unis à Nairobi qui a fait plus de 200 morts. Quatre ans plus tard, la cellule d’Al Qaïda responsable de cet acte s’était attaquée à un hôtel de Mombasa appartenant à un Israélien et avait tenté d’abattre un avion de la compagnie israélienne El Al.
Le ministre de l’Intérieur, Joseph Ole Lenku, a déclaré à la presse que le bilan était de 59 morts et que la priorité des forces de l’ordre était de récupérer les otages sains et saufs.
Il a ajouté que 175 personnes avaient été hospitalisées.
Des enfants figurent parmi les morts, dont l’âge va de deux à 78 ans.
A Paris, l’Elysée a annoncé que deux Françaises avaient été tuées dans « cet acte ignoble ».
« Le président de la République condamne avec la plus grande fermeté ce lâche attentat et il partage la douleur de la famille de nos compatriotes. Il exprime sa totale solidarité avec les autorités kényanes », ajoute-t-elle dans un communiqué.
La Grande-Bretagne a annoncé la mort de trois de ses ressortissants et s’attend à un bilan plus lourd.
LES CHABAAB EXCLUENT DE NÉGOCIER
Deux diplomates sont morts, un Canadien et un Ghanéen, le poète Kofi Awoonor. La femme d’un diplomate américain a aussi été tuée et plusieurs Américains ont été blessés, a dit John Kerry.
Le secrétaire d’Etat américain a proposé au Kenya l’aide des Etats-Unis pour tenter de régler cette crise.
Des experts israéliens conseillent les autorités kényanes, a-t-on appris de source proche des services de sécurité israéliens. « Des conseillers israéliens aident à l’élaboration de la stratégie de négociation mais aucun Israélien n’est impliqué dans un quelconque assaut imminent », a dit cette source.
Seule « une poignée » d’Israéliens se trouvent sur place, « purement dans un rôle consultatif », a-t-elle ajouté.
Tous les Israéliens qui se trouvaient à l’intérieur du centre commercial au moment de l’attaque ont été récupérés sains et saufs.
Selon Joseph Ole Lenku, il y a 10 à 15 assaillants et les forces de sécurité sont parvenues à les « isoler », même si aucun contact n’a été établi avec eux.
Al Chabaab a exclu de négocier. « Dix heures se sont écoulées et les moudjahidine sont toujours forts à l’intérieur du Westgate Mall et tiennent toujours leurs positions, tout cela grâce à Dieu ! », disent-ils sur leur compte Twitter.
Avec James Macharia, Kevin Mwanza, Drazen Jorgic et Duncan Miriri; Jean-Philippe Lefief et Bertrand Boucey pour le service français
Reuters par Richard Lough et Edmund Blair
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