Santé

La tanorexie, ou quand bronzer vire à l’addiction

Les salons de cabines UV prolifèrent même en Espagne, pays qui peut pourtant compter sur des centaines d'heures d'ensoleillement. (photo: AFP)
La tanorexie, ou quand bronzer vire à l’addiction

Par une chaude soirée du mois d’août à Madrid, des clients hâlés défilent dans un centre de bronzage: même en Espagne, un des pays les plus ensoleillés d’Europe, le besoin de soleil peut tourner à l’addiction.

Madrid compte 2749 heures d’ensoleillement par an, soit le double de Londres. Ce qui n’empêche pas Macarena Garcia, étudiante, de s’adonner aux rayons UV.

«Ça ne plaît pas beaucoup aux membres de ma famille, ils me disent que ce n’est pas sain (…) mais eux vivent à la plage! Ici, je travaille et j’ai aussi envie de bronzer», explique-t-elle en sortant du salon Solmania, au centre de Madrid.

«Anorexiques» du bronzage

«J’arrêterais si je n’avais pas le choix, mais ça ne me plairait pas», admet Jose Manuel Rodriguez, ténébreux danseur de 36 ans, qui fait jusqu’à trois séances de bronzage par semaine pour «ne pas perdre son hâle naturel».

Jose Carlos Moreno, de l’Académie espagnole de dermatologie (Aedv), n’hésite pas à parler d’addiction. «Ce sont des personnes bronzées qui ne se sentent jamais suffisamment bronzées», tels des «anorexiques qui se trouvent toujours trop gros».

Leur profil: surtout des femmes et des jeunes de moins de 40 ans, qui bronzent plus de deux fois par semaine, au point de prendre une couleur excessivement orangée ou chocolatée.

Aussi accros que les héroïnomanes

Les cabines de bronzage sont apparues dans les années 1980 aux Etats-Unis. Et les chercheurs américains ont été parmi les premiers à se pencher sur cette addiction, couramment appelée tanorexie, dans les années 2000.

Envie de bronzer au réveil, besoin de «doses» croissantes, anxiété en cas d’arrêt, culpabilité, agacement face aux remarques de l’entourage: ses symptômes sont similaires à ceux de l’addiction à l’héroïne, observe Joel Hillhouse, chercheur à l’Université d’East Tennessee.

Dépendantes, certaines personnes «continuent d’utiliser des cabines alors qu’elles ont un cancer de la peau, volent de l’argent à leurs proches ou s’achètent un lit bronzant pour satisfaire les envies nocturnes», ajoute-t-il.

Recherche d’endorphines

«Il n’y a pas que le paraître qui pousse les gens à bronzer, il y a aussi le bien-être», assure Steve Feldman, dermatologue à l’Université Wake Forest (Caroline du Sud).

Les rayons UV, une drogue ? «Absolument», répond-il.

Le soleil stimule la production de mélanine, pigment qui colore la peau, et ce phénomène libère des endorphines, souligne le Dr Feldman, ces hormones proches de la morphine donnant une sensation de bien-être et apaisant la douleur.

A cela s’ajoute une pression sociale. Les mannequins à la parfaite peau caramel, les footballeurs riches, beaux, bronzés comme la star du Real Madrid Cristiano Ronaldo: autant de figures que les jeunes ont envie d’imiter.

Gare au cancer de la peau

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a pourtant classé les appareils à UV comme cancérigènes en 2012. L’usage de ces appareils «augmente le risque de mélanome de 20%», indique Vanessa Rock, du comité australien de lutte contre le cancer, en citant plusieurs études.

En cas d’usage avant l’âge de 35 ans, le risque de mélanome augmente même de 75%, affirme une étude publiée en juin 2010. Le Brésil a été le premier à complètement interdire ces appareils en 2009, suivi de l’Australie en 2014.

L’incidence du mélanome – cancer de la peau le plus agressif – reste en Australie la plus élevée du monde avec 11’000 cas par an. Mais le cancer de la peau tend à s’y stabiliser chez les moins de 45 ans grâce «aux campagnes publiques de sensibilisation et à une meilleure prise de conscience», se félicite Vanessa Rock.

Prolifération en Espagne

Mais en Espagne, où l’on diagnostique 3600 cas de mélanomes par an, «les cabines de bronzage pullulent, aussi bien sous forme de centres que de services complémentaires dans des instituts de beauté ou des salles de sport», s’inquiète le docteur Moreno. Pour autant, «la population consulte de plus en plus tôt» grâce aux campagnes d’information.

Il n’existe cependant pas encore de soins spécialisés pour les tanorexiques.

Aux Etats-Unis, où les cabines de bronzage font l’objet d’un avertissement renforcé depuis 2014 et sont, dans certains Etats, interdits aux moins de 18 ans, les chercheurs suggèrent la création de groupes de soutien, à l’image des alcooliques anonymes, et tentent de substituer au bronzage des alternatives relaxantes telles que le massage ou le yoga.

Jose Carlos Moreno verrait bien une mise en garde explicite dans les centres de bronzage «comme sur les paquets de cigarettes qui évoquent clairement les maladies liées au tabagisme».

 

Source : AFP

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